(avec) Aliette de Panafieu




PROCRASTINER
Sans culpabilité


Quoi ? Attendre le dernier moment pour rédiger un article !
Quoi ? Lire un roman policier au lieu de compulser ses notes ou de classer ses dossiers !
Quoi ? Faire la vaisselle au lieu de passer un coup de teléphone au cabinet de recrutement !

Inconscience, scénario d’échec, mauvaise volonté ou absence de courage, autant de jugements sévères posés sur celui qui attend le dernier moment.
Imprudence ou impudence ?
Sabotage ou pari sur ses ressources cachées ?
Geste de désespoir ou gage de confiance en soi ?

Notre éducation, sage, rationnelle, prévoyante, nous incite à croire, dur comme fer, que plus l’élève prend de temps pour lire la leçon, mieux il la comprend et mieux il la retient.                    Erreur !

Libérés des consignes d’élèves consciencieux, les enfants nous étonnent par leurs prouesses, leurs ruses qui confinent aux exploits, notamment à celui du « dernier moment ».
Craignons-nous, pour nous, la méconnaissance de la réalité du temps ?
Trouvons-nous suspecte la jouissance de ce jeu avec les limites ?
Eprouvons-nous de la jalousie vis-à-vis des experts dans cet art de différer, faute de savoir nous-mêmes faire des économies de temps et d’énergie ?

Nous est-il difficile d’y déceler de la confiance ? Cette confiance est ici assortie d’inconfort, de stress et de désapprobation. Il s’agit d’un pari sur l’avenir, d’audace, de sensations contradictoires, d’alternance entre doute et tranquilité, entre frustration et plaisir, entre loyauté et permission.

Il n’est ni intéressant, ni utile, ni facile de se débarrasser de ce symptôme.
Accueillons cette posture paradoxale comme un atout !

La procrastination est associée à la confiance en ce qu’elle en souligne sa spécificité : irrationnelle, illogique, risquée.